Yes ! Rémi Checchetto

Yes ! 

Barack Obama est content
Kristin est contente
Barack Obama va être de plus en plus content
Kristin idem

Ça commence bien

A part ça
Barack Obama est un personnage de fiction
Kristin est un personnage de fiction
Au moment où ils se rencontrent
Et c’est là une chose étincelante autant qu’opulente de promesses
Au moment où ils se rencontrent
C’est pour elle comme la découverte de l’orange au pied du sapin, ni plus ni moins inouï
Au moment où ils se rencontrent
C’est pour lui comme d’aller ouvrir à quelqu’un qui a sonné à la porte, il ouvre et se voit marchant sur une terre florissante et heureuse
Au moment où ils se rencontrent
Le vingt-trois dix zéro huit, ils sont tous deux des personnages de fiction


La différence ?
Il est sur scène
Elle n’est pas tout à fait sur scène, elle est en bas du podium
L’autre différence ?
Elle a déjà rejoint son personnage,
Il va lui falloir encore un peu de temps avant d’être président
Là où il n’y a pas de différence ?
Tous deux sont au travail, ça leur demande pas mal de muscles parce qu’il faut une grande puissance et une grande dépense musculaire pour travailler dans le mythe
Là où il n’y a pas d’autre différence ?
Ils sont tous deux dans le vase communicant où fiction ne va pas tarder du tout du tout, à coïncider avec vrai pour de vrai


C’est que Barack Obama n’a jamais imaginé qu’il allait être concurrent à la présidence des Etats-Unis d’Amérique
Et puis quoi encore !?
N’importe quoi !
Il a toujours imaginé qu’il allait être président des Etats-Unis d’Amérique
Ben oui
Il l’a toujours vu
Il l’a toujours su


Yes !


Depuis qu’il est haut comme trois pommes il n’a fait des pas que vers la blanche maison
Même lorsqu’il tournait en rond au base-ball il faisait des pas vers la blanche maison
Même lorsqu’il était au coin à l’école il cheminait vers la blanche maison


On répète :
Barack Obama n’a jamais été candidat à la présidence, il a toujours été président des Etats-Unis d’Amérique
Barack Obama n’a jamais été assis sur une chaise de cuisine pas même dans un canapé, il a toujours été assis dans le rond bureau de la blanche maison


C’est comme ça que ça marche, un Barack Obama


C’est comme une Kristin
Une Kristin ça s’appelle Caroline quand c’est haut comme trois pommes puis un jour, quelques temps après être allée au coin à l’école et après avoir tourné en rond en jouant à train train mon palais, elle se voit en Kristin
Elle se voit tout d’abord toute de rouge vêtue
Puis devant une dame à casquette marron
Puis devant un monsieur à casquette rouge surmontée d’un blanc O suivi d’un bleu bama


C’est comme ça que ça fonctionne, une Kristin


Non non Kristin ne se voit pas en président à la blanche maison
Chacun son délire
Chacun son boulot
Même si elle cherche du boulot elle ne se voit pas dans celui-là
Chacun son moteur à combustion

Juste une question d’ambition ou juste une question d’imagination ?
Evidemment une question d’émotion
De température que produisent les émotions
Chacun ses émotions plus ou moins brûlantes qui chauffent à blanc le monteur à combustion en même temps que la bouche, la tête et le cœur et tout et tout et font de nous des forces de la nature
Capables de nous faire avancer sur le calendrier en laissant des empreintes historiques
Capables de nous faire sans cesse neufs comme à la naissance mais en moins cons, oui oui en moins cons puisque doués de facultés supérieures et d’écorchures diverses et variées qui nous guident vers de nouvelles intelligences
Capables de nous faire marcher sur les eaux montantes des obscurités et d’avancer tels des boules de flipper qui inéluctablement gagnent la partie


Et pendant ce temps-là, le monde est sagement assis devant la télé
Ou le monde est en marche pour aller voir Barack Obama en marche vers sa blanche maison
Ou le monde dort parce que de l’autre côté de la terre c’est l’heure de dormir
Ou le monde joue à train train mon palais
Ou le monde joue au base-ball
Pas forcément en s’imaginant devenir Kristin
Pas forcément en se disant tiens tiens je vais être président de la blanche maison
Non
Le monde a d’autres imaginations
D’autres ambitions
D’autres émotions

Yes

Le monde se rêve par exemple champion de base-ball ou de train train mon palais
D’écrire des opéras interprétés par des formules 1
D’inventer une bath de batte de base-ball
Ou un calendrier intachable 


Finalement, chacun son truc à soi
Histoire de ne pas voir disparaître ni sa bouche, ni sa tête, ni son cœur et tout et tout, ni ses facultés, ni ses écorchures diverses et variées
Histoire d’avancer en croyant en soit
En étant illuminé dans la vie
Illuminé comme radieux
Pas illuminé comme dingo


No


D’ailleurs puisque de dingo il est question ici and now
Est-ce timbré de porter un rouge tee-shirt avec dessus un timbre avec dessus un Barack Obama avec dedans la tête du Barack Obama une grande  blanche maison dont il est le patron ?


Et pendant ce temps là le Barack Obama est sur scène
Le Barack Obama est en scelle
Le Barack Obama rejoint à vitesse grand V le Barack Obama président
Le Barack Obama enfant est de plus en plus dans la peau du Barack Obama président, a de plus en plus la coupe de cheveux, les costumes, les gestes et les mots du Barack Obama président
Les gestes sont de plus en plus amples
Les mots sont de plus en plus retransmis
Font le tour de la terre avant que la terre ait le temps de faire un chouia de tour sur elle-même



En fait mister Barack est une dynamo de vélo
Et il est aussi le vélo
Et il est aussi l’ampoule avant du vélo
Et il est aussi le gars qui pédale sur le vélo
Et il est aussi la foule qui pédale sur le vélo
Et il est aussi l’émotion qui chauffe la dynamo
Et il est aussi la confiance qui chauffe la dynamo
Et il est aussi la vitesse qui chauffe l’émotion qui chauffe la confiance qui chauffe la dynamo qui chauffe l’ampoule qui chauffe mister Barack Obama qui chauffe la foule qui lève les bras et pédale en l’air pour pédaler sur le grand vélo qu’est mister Barack Obama


Yes ! (très fort)


Et Kristin ?
Où est Kristin ?
Mais Kristin est mister Barack Obama, voyons
Yes !
Il n’y a que le lui demander
Appelons-là et la voilà dans sa cuisine qui épluche des pommes de terre
Des Belle de Fontenay, évidemment
Qui, pour que l’image soit tout à fait précise et indiscutable, épluche une pomme de terre puis une autre pomme de terre et cetera
Et maintenant lance les pommes de terre une à une dans la casserole comme un basketteur américain
Et les pommes de terre une à une font plouf ! plouf ! plouf ! dans l’eau de la casserole
Et les plouf ! plouf ! plouf ! à répétition éclaboussent chouia le calendrier au mur
Pas un calendrier des pompiers
Non
Mais celui de Barack Obama acheté au supermarché de Lons-le-Saunier
Et les éclaboussures d’eau des plouf ! plouf ! plouf ! font cinquante-deux étoiles sur le calendrier
Constellant
Exactement
En un très joli rond très bien dessiné
Le vingt zéro zéro neuf


Yes ! (très très fort et très très content)